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À Tournai, au bord de l'Escaut, les bateaux rendent la vie dure à Jonathan: "Jour et nuit, ils restent amarrés moteur allumé, est-ce normal?"

 
 

Jonathan en a assez des nuisances occasionnées par les bateaux stationnés devant chez lui. Ce Tournaisien vit en bordure de l'Escaut, dans le quartier du quai du Luchet d'Antoing. Depuis 11 ans, il est confronté à des bruits et des odeurs causés par les bateaux amarrés devant chez lui. Les autorités répondent que le niveau de bruit n'est pas supérieur à celui de la Ville.

Épuisé par les nuisances des bateaux à l'arrêt devant l'immeuble où il réside, Jonathan nous a raconté son ras-le-bol via le bouton orange Alertez-nous : "Les péniches s'arrêtent devant chez nous parce qu'on habite près d'un pont, et donc elles stationnent le plus près possible du pont pour être les premières à démarrer. Dès 6 heures du matin, ça cogne contre les berges."

Lorsqu'il a emménagé dans la cité de logements sociaux située aux bords de l'Escaut, Jonathan n'imaginait pas de telles nuisances : "Ça fait 11 ans que je suis là, et maintenant encore je fais parfois un bond tellement je suis surpris du bruit et des tremblements. Et ça fait un bout de temps que ça dure, déjà au début quand je suis arrivé. Ça fait un bruit de fou, ça résonne."


"Quand le vent monte, on sent les gaz d'échappement"

Les désagréments occasionnés par les bateaux sont de plus en plus difficiles à supporter pour le Tournaisien, d'autant plus avec les fortes chaleurs survenues au mois de juillet. "Impossible de dormir avec les fenêtres ouvertes. Quand le vent monte, on sent les gaz d'échappement, et je suis au cinquième étage, donc imaginez ceux qui vivent au premier. Quand on a eu la canicule, on était obligés d'ouvrir les fenêtres, on n'entend rien, on doit augmenter le son de la télévision au maximum."

Lorsque les bateaux cognent les berges, Jonathan décrit une secousse comparable à un petit "tremblement de terre". Ces secousses créeraient même des fissures à l'extérieur et à l'intérieur du bâtiment qu'il occupe, selon lui. "Le trottoir a été refait il y a même pas quinze jours, et il y a déjà des fissures. Le bâtiment est fissuré, aussi, un jour il va finir par s'écrouler", prédit le Tournaisien. 


 
D'après Jonathan, d'autres voisins subissent ces nuisances, mais n'osent pas témoigner ni se plaindre auprès des autorités compétentes.


Comment expliquer cette situation ?

Jonathan affirme qu'il a envoyé plusieurs mails à la ville de Tournai, ainsi qu'à la direction des voies hydrauliques. Ces autorités lui ont répondu. La situation est principalement due à trois facteurs:

- Il n'y a pas assez de points d'amarrage sur le trajet d'Antoing à Tournai. "Une péniche, même stoppée l'espace d'une nuit avant la réouverture des écluses et les premières manoeuvres du pont Notre-Dame, ne peut jeter l'ancre n'importe où au milieu de la passe navigable de l'Escaut", écrit Christophe Vanmuysen, l'ancien directeur des voies hydrauliques de Tournai. Les horaires, eux, imposent aux bateaux de stopper leur trajet vers 22 heures, et reprendre vers 5 heures 30. 

- Ces péniches sont considérées comme "en stationnement" et non "à l'arrêt". "Nous devons en effet à ce titre mentionner la différence 'légale' qui existe entre arrêt et stationnement, en termes de navigation, tout comme dans le code de la route. Une péniche en attente de la première ouverture d'écluse le matin est considérée comme à l'arrêt et non en stationnement. Elle est dès lors autorisée à s'amarrer sur les bollards tel qu'au Luchet d'Antoing."

- Enfin, ce ne sont pas les moteurs qui tournent, mais bien des générateurs d'électricité. Ce sont eux qui permettent d'approvisionner le bateau en énergie, indispensable à la vie quotidienne des bateliers.

Toujours selon Christophe Vanmuysen, ancien directeur des voies hydrauliques de Tournai, les bateliers eux-mêmes préfèrent des bateaux plus silencieux: "Sachez que les normes de bruit et de pollution appliquées sur les groupes et les motorisations de péniches sont de plus en plus drastiques, mais aussi et surtout que les bateliers, pour qui ces groupes et moteurs fonctionnent à proximité immédiate de leurs chambres, sont les premiers à souhaiter qu'ils soient le plus silencieux !"


Les fissures ne seraient pas dues aux bateaux

Didier Descamps, chef de district pour la Direction des Voies hydrauliques de Tournai, nous l'affirme : les bateaux de navigation intérieure n'auraient pas pu causer les fissures et dégâts mentionnés par Jonathan. "Entre le quai et son bateau, le batelier interpose systématiquement une 'défense' en bois, voire une baderne en caoutchouc. Des chocs aux bateaux abîmeraient son matériel et la vie à bord serait impossible s'ils se répétaient."

Le chef de district émet tout de même une piste quant aux dégâts occasionnés sur les bords du quai. "Les pierres de couronnement du quai peuvent être déchaussées par le frottement répété durant des années des cordes d'amarrages tendues entre le pieu au sol et le bollard de bord."

Didier Descamps précise également qu'aucun propriétaire n'a signalé d'éventuels dégâts dus aux chocs des bateaux. Aussi, la société de logements sociaux à qui appartient l'appartement de Jonathan ne s'est elle non plus jamais manifestée. 


Aucune infraction commise, selon la Direction des Voies hydrauliques

Aucune solution ne peut être apportée pour l'instant, car aucune infraction n'est commise, selon Christophe Vanmuysen. "Hormis ces explications, nous ne pouvons malheureusement pas apporter de solution pérenne à la situation que vous évoquez en ce qu'elle ne relève d'aucune infraction aux règles de la navigation." La Direction des Voies hydrauliques de Tournai a tout de même souligné qu'un rappel des règles sera transmis aux bateliers qui amarrent à proximité d'immeubles habités.

Ils font des travaux pour accueillir de plus grands bateaux, donc j'imagine même pas les nuisances, avec ça.

Cette situation n'étonne pas Pascal Roland, batelier et président de l'association de la batellerie belge "Notre Droit". "Quand un bateau vient s'amarrer quelque part, avec un groupe électrogène qui tourne, parfois ça dérange. Mais ce sont aussi des gens qui vivent sur les bateaux, et ils ont le droit aussi d'avoir de l'électricité".

Selon lui, une solution existe : "Il faut impérativement que les autorités mettent des installations pour éviter ces nuisances-là. Sur l'Escaut, ça existe à Audenarde, où des prises ont été installées pour les bateaux. J'espère qu'avec les travaux prévus à Tournai, on installera des lieux de stationnement équipés, avec des bornes électriques pour le secteur."

Ces travaux, pourtant ne rassurent pas Jonathan. Au contraire, le riverain craint que des bateaux plus grands, plus bruyants, ne viennent empirer la situation. "Ça fait quelques années qu'ils font des travaux pour accueillir de plus grands bateaux, donc j'imagine même pas les nuisances, et les coups, avec ça."

Selon Didier Descamps, chef de district à la Direction des Voies hydrauliques, aucune borne d'électricité ne sera installée aux abords du quai du Luchet d'Antoing, "le quai n'étant pas destiné au stationnement permanent." Malheureusement pour Jonathan, "les travaux en cours ne modifieront pas la situation au Luchet d'Antoing. Sur une voie d'eau navigable, les passages des bateaux font partie du quotidien, le bruit qu'ils occasionnent est inférieur au bruit ambiant de la Ville" conclut Didier Descamps qui dit cependant comprendre que cela puisse incommoder certains riverains.


 

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