Six ans que ses fans attendaient ce moment: sans trahir d'émotion, Mylène Farmer les a comblés en délivrant, pour son retour sur scène vendredi à La Défense Arena, un show gigantesque durant lequel les séquences en playback étaient trop nombreuses.
Les gros plans ne mentent jamais. Superproduction oblige, l'écran géant le long de la scène et les plus petits suspendus au-dessus du public étaient de rigueur pour ce spectacle au dispositif unique pour une production française. Ainsi les 27.000 spectateurs, qui ont rempli la plus grande salle couverte d'Europe, ont-ils pu admirer leur idole de très près et constater que celle-ci ne chantait pas toujours, surtout pendant ses chorégraphies.
Peu importe pour la très grande majorité des fans, même si certains concédaient que ce recours au playback eut lieu plus souvent que d'habitude. Car ils auront vu leur favorite tenir dignement son rang de plus grande show-woman française de ces 30 dernières années au terme des deux heures de concert, le premier d'une série de neuf qui devraient rassembler plus de 235.000 personnes.
Comme à chaque fois, "Mylène soigne ses entrées" entend-on dans un frémissement qui précède l'assourdissant orage. C'est d'ailleurs bien au plafond qu'il faut regarder: la chanteuse de 57 ans apparaît dans un croissant de lune qui descend du ciel. Sortie de ce cocon lumineux, elle regagne la scène et se poste quelques instants immobile devant les yeux ébahis et les bouches bées.
L'artiste qui portera au total six tenues différentes, toutes confectionnées par Jean-Paul Gaultier, débute sur "Interstellaires", issu de son dernier album "Désobéissance", sorti en septembre 2018 et écoulé à plus de 200.000 exemplaires.
Pendant que ses musiciens apparaissent derrière elle, tractés sur deux plateformes, Mylène Farmer accueille l'ovation à la fin de ce titre sans que son visage ne trahisse d'émotion. Point à peine le sourire de celle qui sait qu'elle a déjà partie gagnée.
Triptyque intimiste
Pourtant on la sent plutôt stressée pour cette première date. Les tubes ont beau déjà défiler, "Sans logique", qu'elle n'avait plus chanté depuis 1989 nous souffle-t-on exalté, "Rolling Stone", "Pourvu qu'elles soient douces", "California", ils ne comblent pas l'impression de distance qui se dégage d'elle, alors qu'en face la ferveur est immense.
Autour, les seize danseurs et danseuses se démènent et se déhanchent dans un rythme bien plus élevé que le sien, créant un contraste dynamique saisissant qui a pour effet de rendre Mylène plus statique qu'elle n'est. La véritable communion avec le public survient enfin à mi-parcours, sur l'avancée de scène pour un triptyque intimiste regroupant "Un jour ou l'autre", "Ainsi soit je" et "Innamoramento". Sur son passage, elle s'accroupit, touche des mains qui ne seront pas lavées de sitôt.
Dans une ambiance de cathédrale, le public reprend en choeur ses refrains et ses yeux brillent enfin. Les larmes montent, "comme toujours au même moment", ironisent certains à qui on ne la fait plus, mais ne coulent pas. Contrôle total ? Pudeur accrue ? Le débat n'est pas prêt d'être clos chez les fans.
Bouleversée ou pas par cette séquence, c'est bien plus relâchée qu'elle aborde la suite "Sans contrefaçon" et ce, malgré le raté au démarrage d'"Histoire de fesses" où aucun son n'accompagne le début de la chorégraphie.
Après "Désenchantée", tube qui mit K.O. toute une génération, puis "Rêver", Mylène susurre sa seule phrase de la soirée: "J'aimerais que vous puissiez être sur la scène pour voir ce spectacle incroyable". Triomphante, assise sur un trône à tête de loup - "le camp des Stark dans Game of Thrones!", jubilent certains -, elle finit toutefois dans les flammes lors du rappel sur "L'horloge", adapté du poème de Charles Baudelaire, qui constituait, assure-t-on, son entrée de scène lors de sa première tournée en 1989.
Trente ans après, la boucle est bouclée.
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